Authors Sylvain Guillaume-Gentil Thierry Delobel Julien Allaire
En 2019, Transitec a commandé et financé une thèse au sein de l'Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) consacrée à l'évaporation du trafic. Elle a été réalisée par Pauline Hosotte sous la direction du Professeur Vincent Kaufmann.
Cette recherche résulte de quatre années d’investigation pratique et scientifique du phénomène d’évaporation du trafic, considéré puis démontré comme étant l’inverse de l’induction du trafic. Elle a permis d'ancrer dans la pratique et dans le temps une thématique orpheline et peu documentée dans la littérature à laquelle font face les planificateur.trice.s de la mobilité.
Notre recherche a cheminé avec un pied solidement ancré dans la pratique de l’ingénierie de la mobilité et l’autre dans la sociologie urbaine des comportements de mobilité. En immersion dans le premier domaine en tant qu’« ingénieure d’étude » sur des projets variés, j’ai pu enquêter de nombreux cas d’étude et enrichir la thèse des interrogations des expert.e.s et mandant.e.s. Pour y répondre, au delà du quantitatif et du mesurable qui constituent le pain quotidien de l’ingénieur.e, les méthodes qualitatives de la sociologie urbaine ont été mobilisées afin de déchiffrer les logiques d’action des individus qui composent les flux de trafic.
Cette approche singulière a fait apparaitre le nombre et la diversité des facteurs qui entrent en ligne de compte dans le mécanisme de l’évaporation du trafic. Il s’agit en particulier de la motilité, du coût mental d’apprentissage, de l’ancrage des habitudes modales et de la rationalité en valeurs de chaque individu. A la croisée des trois axes de recherche, habituellement traités séparément et que nous avons ici conjugués dans nos études de cas, soit la temporalité de perturbation, les (ré)actions des autorités et le poids des habitudes (multi)modales, nous avons pu observer au-delà des ordres de grandeur de l’évaporation du trafic.
Il en résulte, tout d’abord, qu’une évaporation du trafic est réalisable sur le temps long de la planification urbaine, car le temps des habitudes de mobilité et de l’apprentissage des pratiques est long également, bien qu’il semble s’accélérer une fois l’apprentissage amorcé. De plus, nos résultats montrent que les volumes de trafic que nous pensions toujours croissants par le passé peuvent être maitrisés. Cette confiance légitime dans la réversibilité de l’induction du trafic attire l’attention sur les leviers qui sont aujourd’hui, à leur tour, peut-être sous-estimés dans la planification de la mobilité.
Ensuite, l’étude de chantiers urbains a montré que les clés de compréhension des réactions du flux résident dans les profils divers des individus qui le composent. Sachant leurs logiques d’action, il est possible d’apprécier les changements de comportement qui seront temporaires et ceux qui seront durables, et ainsi de les aiguiller si souhaité.
Finalement, nous avons révélé que, face à l’imprévu, l’activation des leviers de la motilité est forte et prompte, dans le but de vaincre les freins personnels au changement. Dans ces cas, les comportements adoptés semblent se pérenniser au-delà de la durée de perturbation.
Ainsi, l’évaporation du trafic apparait être bien plus qu’une nouvelle variable à considérer dans les analyses et la planification de la mobilité. Elle remet en question la logique qui a conduit la planification des déplacements à l'ère de l'automobile.
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